jueves, 25 de febrero de 2016

Lettre de Mark Rothko à Clay Spohn

11 mai 1948




Rothko
1288 – 6ème Ave.
N. Y.
Cher Clay,
Clyff vient juste de m’apprendre pour ta maladie — heureusement déjà passée, ou presque passée ai-je cru comprendre — Mell et moi nous hâtons de te souhaiter un bon rétablissement, et te redisons que nous pensons à toi et parlons de toi et de l’été très souvent.
Peut-être n’avons-nous pas même répondu à cette longue lettre que tu nous as envoyée cet hiver, mais si j’étais capable de transmettre un peu de moi-même comme tu le fais dans tes lettres, j’écrirais avec plus de plaisir et plus souvent. Les choses sont telles que je dois presque m’arracher à moi-même une page d’unité.
Je commence à haïr la vie de peintre. On commence par s’entraîner avec ce qui est à l’intérieur de soi en gardant encore un pied dans le monde normal. Puis tu es pris d’une frénésie qui t’emporte au sommet de la folie, aussi loin que tu peux aller sans jamais revenir. Le retour est une suite de semaines hébétées pendant lesquelles tu n’es qu’à moitié vivant. C’est l’Histoire [sic] de mon année depuis que je t’ai vu. Je commence à sentir qu’il faut bien rompre ce cycle quelque part. Pour le reste, tu dépenses ton énergie à résister à la succion des mentalités de boutiquiers pour lesquelles, de toute évidence, on traverse cet enfer.
J’aimerais que nous puissions revivre, sous un autre jour, notre dernier été, car aussi souvent que j’y pense, je me le rappelle comme d’un moment capital. Peut-être peux-tu planifier une visite à N.Y. dans un futur proche. Écris-nous encore, s’il te plaît. Et embrasse pour nous Doug, Jerry, et tous nos amis de l’été dernier.
Mark







miércoles, 24 de febrero de 2016

Vila-Matas regresa con "Marienbad eléctrico", una "novela única sin género"




Vila-Matas regresa con "Marienbad eléctrico", una "novela única sin género"

Enrique Vila-Matas vuelve a contactar con los lectores con "Marienbad eléctrico", una "novela única, sin género", a partir de las conversaciones y el intercambio de ideas que mantiene desde hace ocho años con la artista francesa Dominique González-Foerster, especialmente en el café Bonaparte de París.
El escritor barcelonés ha explicado hoy en rueda de prensa que este libro inclasificable nace a petición de su editora francesa, Dominique Bourgois, al conocer sus colaboraciones con González-Foerster, una de las artistas galas más reconocidas internacionalmente.
Publicada por Seix Barral, la obra, según su autor, tiene como tesis "la fe en el arte", la pasión por el arte, "como el centro de la existencia", y tanto puede verse como "una novela insólita, una instalación, un texto para un catálogo, un ensayo o incluso puede entenderse como un poema".
También le ha parecido "genial" la descripción que de ella ha realizado un amigo suyo esta misma mañana: "Quizá es una novela única sin género".
En el libro, construido a partir "de los sucesivos equívocos" e incluso casualidades que han marcado su relación con la artista francesa desde que se conocieran en 2007 en Granada, el autor de "París no se acaba nunca" escribe que donde ambos más coinciden es en su "absoluta fe en el arte".
Y utiliza para ello la declaración que hizo Duchamp al respecto: "Creo que el arte es la única forma de actividad por la que el hombre como tal se manifiesta como verdadero individuo. Sólo gracias a ella puede superar el estadio animal, porque el arte es una salida hacia regiones donde no dominan ni el tiempo ni el espacio".
A lo largo de estos años de conversaciones y encuentros, él también colabora con ella en sus propuestas en lugares como el Palacio de Cristal de Madrid o en la Tate de Londres, mientras que ella acaba apareciendo en uno de sus libros.
Sin embargo, ha advertido Vila-Matas, estas colaboraciones no siempre son como él las concibe en un principio, ni todas sus propuestas las acaba integrando Dominique González-Forester en sus creaciones artísticas.
Sin embargo, periódicamente tienen "conexiones" y en sus conversaciones la artista, que no tiene taller, le da pistas sobre sus trabajos futuros o ha permitido que el novelista haya sido el único afortunado en contar con la llave que abría la puerta de una habitación que creó para una exposición.
"Cuando entré, no había nada, más allá de otra puerta, pero no la pude abrir", ha comentado hoy.
Con constantes referencias al cine y a autores como Rimbaud, Beckett, Sebald, Bolaño, Claudio Magris o Julio Ramón Ribeyro, el libro lleva en su título la palabra "Marienbad", que tiene relación con la película "El año pasado en Marienbad", de Alain Resnais y basada en la primera novela de Bioy Casares, "La invención de Morel".
Para Vila-Matas se trata de un film, que él vio en el cine Savoy de Barcelona, con un guión de Robbe-Grillet, "el más genialmente incomprensible de toda la historia del cine". "La película es lo que tú crees que está pasando: cada uno la interpreta como quiere", ha dicho.
Justamente, ha confesado que le gustan las películas y los cuadros que no entiende, porque "eso ofrece la posibilidad de abrirlos a interpretaciones distintas".
Preguntado por nuevos proyectos, Vila-Matas, que el pasado mes de septiembre fue galardonado con el Premio Feria Internacional del Libro de Guadalajara (FIL) en Lenguas Romances, ha avanzado que está trabajando "a fondo" en un libro de ficción que rompe la línea que ha trazado con sus dos últimos títulos, muy relacionados con el arte.

Lettre de Marcel Proust à Jean Cocteau 2 min

1911




Cher Jean
J’ai retrouvé une lettre adressée à vous par moi au Cap Martin, je vous en copie q.q. passages.
Dans ton Midi, pour ces raisons, je t’écris, Jean :
Le silence est de plomb, la parole d’argent
Et les mots font du bien où l’on voit l’effigie
De l’Amitié, ou de Minerve, ou bien… d’Hygie.
Donc reçois tous ceux-ci comme maigre salaire
De ton charme vivant qui sait si bien me plaire.
D’abord prose : tu sais, homme talentueux
M’imaginant Verlainien et fastueux
Tu m’as écrit sur du papier du Mercure
Pour joindre aux boulingrins un faune dont n’a cure
Ton ami qui n’est pas si féru de Verlaine
Et grogne s’il lui faut ouvrir son bas de laine
Aussi je n’envoyai, Jean, que cinquante francs.
Mais j’ai honte. Faut-il doubler, tripler ? Sois franc.
Autre chose, j’irai voir Maman Colibri
Parmi les jeunes gens flos libri :
Quels sont intéressants (j’entends intéressés)
En dehors du classique et charmant Puylagarde
Un peu Forain pour moi dans sa face hagarde.
Peut-on sentir de près les roses et les lys
De celui dont le nom hélas est Cazalis
Et recevoir cela de Monteaux, de Jean [Kern]
Que j’appelais enfant du fromage à la [Kern]
Cher Jean je n’ai pas la force d’en copier plus et j’ai beaucoup sauté. Inutile de répondre puisque Maman Colibri est finie. Et d’ailleurs tout cela, il faudra bien vous l’avouer, est de la blague (Pas mon amitié, elle est vraie).
Adieu cher Jean.
Marcel
Excusez le tutoiement qui était « poétique » et dont vous excuserez la familiarité et la licence en lui appliquant la même épithète atténuante. Tendresses à Lucien si vous le voyez.
Si vous êtes fort secret, je vous raconterai mille choses (inutile de vous dire que bien que cela vienne après le mot Lucien, ces choses n’ont aucun rapport avec lui dont je n’ai à raconter rien sinon combien je l’aime et l’admire).

martes, 23 de febrero de 2016

Lettre de Vladimir Nabokov à Véra

Novembre 1923



Mon bonheur, mon merveilleux bonheur doré, comment puis-je t’expliquer à quel point je suis tout à toi — avec tous mes souvenirs, mes poèmes, mes éclats, mes tornades intérieures ? Ou t’expliquer que je ne peux pas écrire un mot sans entendre la façon dont tu vas le prononcer — et que je ne peux me rappeler de la moindre bagatelle que j’ai vécue sans éprouver le regret si vif que nous ne l’ayons pas vécue ensemble — que ce soit la chose la plus personnelle, la plus intransmissible, ou juste un coucher de soleil au détour d’une route — tu vois ce que je veux dire, mon bonheur ?
Et je le sais : je ne peux rien te dire avec des mots — et quand je le fais au téléphone, alors cela sort d’une manière complètement fausse. Parce qu’avec toi on se doit de parler merveilleusement, de la façon dont on parle aux gens qui sont partis depuis longtemps… en des termes purs et légers et d’une précision spirituelle… On t’écorcherait avec un vilain diminutif — car tu es absolument évocatrice, comme l’eau de la mer, ma belle.
Je jure — et la tâche d’encre n’a rien à voir avec cela — je jure par tout ce qui m’est cher, tout ce en quoi je crois, je jure que je n’ai jamais aimé auparavant comme je t’aime — avec tant de tendresse, jusqu’aux larmes, et avec une telle sensation de lumière.
[…]
Plus que tout je souhaite que tu sois heureuse, et il me semble que je pourrais te donner ce bonheur — un bonheur simple et radieux, mais pas tout à fait banal…
Je serais prêt à te donner tout mon sang si je le devais — c’est difficile à expliquer, ça semble plat, mais c’est comme cela. Voilà, je vais te dire : avec mon amour j’aurais pu remplir dix siècles de feu, de chansons, de courage — dix siècles tous entiers, prodigieux et aériens, pleins de chevaliers chevauchant des collines éclatantes, et de légendes à propos de géants, et de troyens féroces, et de voiles oranges, et de pirates, et de poètes. Et ce n’est pas de la littérature car si tu relis avec attention tu verras que les chevaliers se sont révélés être idiots.
[…]
Je veux simplement te dire que d’une manière ou d’une autre je ne peux pas imaginer ma vie sans toi…
Je t’aime, je te veux, j’ai insupportablement besoin de toi… Tes yeux — qui brillent avec tellement d’émerveillement quand, la tête renversée en arrière, tu dis quelque chose de drôle — tes yeux, ta voix, tes lèvres, tes épaules, si lumineux, radieux…
Tu es entrée dans ma vie, pas comme si tu rendais une visite… mais comme si tu arrivais dans un royaume où toutes les rivières attendaient ton reflet, et toutes les routes, tes pas.

domingo, 21 de febrero de 2016

Umberto Eco, el escritor y los signos

Umberto eco



















La muerte de Umberto Eco plantea varios interrogantes. ¿Es posible hacer literatura de masas con la dignidad de una obra inspirada por una alta exigencia artística? ¿Tiene sentido mantener las clásicas distinciones entre géneros o hemos entrado en una época caracterizada por la hibridez? ¿Hay límites entre lo ficticio y lo real que no deben traspasarse? ¿Cuál es el papel del escritor en una sociedad que tiende a menospreciar el hecho estético y no reconoce la autoridad de los intelectuales? Umberto Eco se doctoró en 1954 en la Universidad de Turín, con una tesis que se publicaría dos años más tarde con el título El problema estético en Santo Tomás de Aquino. Profesor de comunicación visual en Florencia, se especializó en semiótica y en 1962 publicó Obra abierta, un inspirado ensayo que reproducía las principales tesis de la Escuela Hermenéutica de Hans-George Gadamer: no hay obras cerradas y con un sentido unilateral y definitivo, sino textos en movimiento caracterizados por la polisemia y la polifonía. El sentido no debe buscarse en la realidad empírica, sino en un orbe inteligible, semejante al Mundo de las Ideas de Platón. Wittgenstein no se equivocaba al postular que el sentido del mundo se encuentra más allá de sus límites físicos. En el caso de la literatura y el arte, no hay una verdad revelada ni una escisión ontológica. Simplemente, la referencia del hecho estético es el la historia del hecho estético, con su tradición precedente y las inevitables transformaciones que experimenta una obra con el paso de las generaciones. Cada interpretación es un nuevo estrato que engrosa el perfil de un texto. Por eso, la crítica y la creación literarias son arqueología, pero arqueología viva, dinámica, que -lejos de preservar el pasado- lo multiplica en distintas direcciones.

Corroborando las tesis de Roland Barthes, Eco postula que en cada obra hay una estructura que soporta los cambios introducidos por cada lector y cada época. No se trata de una estructura estática, sino elástica que convierte la experiencia estética en una interlocución entre el autor y el espectador, o entre el autor y otro autor. Cualquier obra es una fusión de horizontes. Es imposible concebir a Leopardi, sin Dante y Hölderlin. La literatura siempre es un palimpsesto, pues la escritura (o el arte) siempre deja una huella, un surco, que otros aprovechan para crear nuevas formas.

Umberto Eco profundiza su análisis de la cultura y la creación artística en Apocalípticos e integrados (1964), interrogándose sobre el valor de la cultura de masas. Eco se aleja de las posiciones apocalípticas o aristocráticas, que desdeñan la cultura popular. La distinción entre alta y baja cultura formulada por Ortega y Gasset en La rebelión de las masas (1930) le parece estéril, pues la cultura popular no es el fruto de una degradación estética, sino la expresión de una época o, por utilizar un concepto hegeliano, una figura que encarna el devenir del Espíritu. Superman es un mito moderno, tan valioso como Heracles, Aquiles o Sansón. El superhombre del cómic norteamericano no es una vulgarización del mito del héroe, sino una actualización del viejo drama del paladín, campeón o semidiós, cuyo poder esconde una trágica vulnerabilidad. En el caso de Superman, el talón de Aquiles se convierte en exposición a un mineral extraterrestre, la famosa "kryptonita". Este recurso no significa bajar un escalón en la escala épica, sino renovar su potencial dramático.

El nombre de la rosa, que apareció en 1980, es la plasmación literaria de esta interpretación de la cultura. Ambientada en el siglo XIV, la peripecia de fray Guillermo de Baskerville y su pupilo Adso Melk en la abadía de los Apeninos ligures se despliega como una trama policial, con grandes dosis de suspense. Es indiscutible que el éxito de la novela procede de esa intriga, pero la cadena de misteriosos asesinatos se revela compatible con los conflictos teológicos entre franciscanos y dominicos. Los franciscanos reivindican la pobreza evangélica y la ternura de Jesús, que advirtió: "Misericordia quiero, no penitencia". No conciben límites en el poder de Dios y creen que podría haber creado un mundo donde el pecado fuera virtud o el tiempo avanzara macha atrás. Incluso podría haber engendrado un universo donde no existiera Dios. Por el contrario, los dominicos creen que Dios está limitado por la Razón. Su voluntad es omnipotente, pero no puede cambiar las leyes de la naturaleza, invirtiendo el orden temporal o transformando el mal en excelencia moral. La aparición en la biblioteca de la abadía de la extraviada sección de la Poética aristotélica dedicada a la comedia amenaza con añadir nuevas fisuras a la Cristiandad, justificando el escarnio de cualquier verdad de fe, con el pretexto de no oponer cortapisas ni objeciones al humor. La risa es subversiva, insolente e impúdica. No puede contar con el respaldo del Filósofo, término que se atribuía por excelencia a Aristóteles en el siglo XIII. Ocultar ese manuscrito justifica perpetrar los crímenes más horrendos.

Creo que el mejor Eco se encuentra en los tres títulos citados. El resto de su obra tiene un indudable interés, pero carece de la misma altura. Eco intentó repetir la fórmula de El nombre de la rosa con El péndulo de Foucault (1988), La isla del día de antes (1994), Baudolino (2000), La misteriosa llama de la Reina Loana (2004) y El cementerio de Praga (2010), pero con resultados mucho más mediocres. No olvido su Tratado de semiótica general (1975) y su ensayo Lector in fabula (1979), que aportaron brillantes ideas sobre la intertextualidad, los signos y la comunicación. Sin la profundidad de Gadamer o Ricoeur, Eco abordó el tema de la comprensión, una forma de conocimiento alternativa a la verificación empírica de las ciencias naturales, que ha reducido la verdad a tristes evidencias, proscribiendo experiencias como la fe y menoscabando la trascendencia del fenómeno estético.

Al igual que Borges, Eco preconizó la autonomía del hecho literario. El escritor no se nutre necesariamente de vivencias, sino de lecturas. Escribir es una extraña forma de vivir, pero no está de más recordar que la palabra es la principal seña de identidad de la especie humana. Creo que ahora estamos en condiciones de responder a las preguntas del inicio de esta nota. El nombre de la rosa es la prueba irrefutable de que la cultura de masas no está divorciada del rigor estético. La reciente muerte de Harper Lee, autora de Matar a un ruiseñor(1960), corrobora esta tesis. Los límites entre lo real y lo ficticio deberían ser inexistentes en el ámbito de lo imaginario, pues la creación artística exige una completa libertad.

En Número Cero (2015), Eco critica al periodismo sensacionalista, pero desliza otro mensaje no menos importante: el escritor es un demiurgo que dilata lo real. Por eso mismo, resulta absurdo respetar la canónica de los géneros. A sangre fría (1966), de Truman Capote, es a la vez novela e investigación periodística. El nombre de la rosa es novela histórica y policíaca, teología y filosofía, e incluso se permite una breve incursión en el romance y la pulsión sexual. Eco no fue Camus ni Unamuno, pero siempre se mantuvo al corriente de los cambios políticos y sociales, expresando opiniones que agradaron a unos e irritaron a otros. No ocultó su antipatía hacia Ratzinger ni su aprecio hacia la labor reformadora del Papa Francisco. Su visión de las cosas a veces pecó de cierto apresuramiento. Como buen italiano, se apasionaba con facilidad, lo cual no suele favorecer la ecuanimidad. ¿Soñaba Eco con el paraíso? Es posible. Si era así, su fantasía le atribuiría forma de biblioteca. No me cuesta mucho trabajo imaginarlo en la Biblioteca de Babel, discutiendo con Borges sobre el tiempo o los universales

Muere Umberto Eco, el sabio que llegó al público



Umberto Eco, en la Universidad de Burgos, en 2013. Cristóbal Manuel / REUTERS-QUALITY
Odiaba los lugares comunes y las frases hechas, y tal vez para evitar las inevitables —“Italia está de luto”, “Ahora somos más pobres”, “El hombre que lo sabía todo”—, el escritor, filósofo y semiólogo italiano Umberto Eco dispuso que la noticia de su muerte, acaecida la noche del viernes a los 84 años en su casa de Milán, fuese acompañada por la de la publicación de un nuevo libro, como una invitación a recoger el testigo de su mirada crítica, a veces divertida y a veces voraz, de ese ensayo del mundo que es Italia. “A la hora de su muerte”, dijo el editor Mario Andreose tras dar el pésame a su familia, “los deseos de Eco eran coherentes con su vida profundamente laica”. Su despedida, por tanto, se celebrará el martes en un acto civil en el Castello Sforzesco, una joya arquitéctonica del siglo XV que el autor de El nombre de la rosa (vendió 30 millones de ejemplares) y El péndulo de Foucault podía ver desde la ventana de su casa.
A la mañana siguiente de conocerse la noticia, los alumnos de Eco se acercaron a la plaza Castello para, silenciosamente, dejar rosas blancas bajo la casa de un maestro que, como escribe Juan Cruz, “era un sabio que conocía todas las cosas simulando que las ignoraba para seguir aprendiendo”. Esa es la clave. Umberto Eco nunca atropelló a nadie con su infinita sabiduría. De ahí que, de todos los artículos laudatorios que publica la prensa italiana, tal vez el que menos chirría con el carácter de Il Professore sea el del periodista Gianni Rotta en La Stampa de Turín: “Filósofo, padre de la semiótica, escritor, profesor universitario, periodista, experto en libros antiguos: en cada una de sus almas Umberto Eco era una estrella internacional, pero con sus estudiantes, lectores, colegas, jamás Eco exhibió la pose snob que tal vez otros escritores sí habrían adoptado de haber publicado best sellers como El nombre de la rosa o El péndulo de Foucault. Umberto Eco reía, se informaba de las novedades y —encendiendo un cigarro— contaba la última broma antes de presentar una nueva teoría lingüística”. Ese, y muchos otros, era el intelectual que ahora despide Italia.

Abandono de la fe
Hijo de comerciantes, Umberto Eco nació en la ciudad piamontesa de Alessandria en 1932. Formó parte activa de los movimientos juveniles de Acción Católica, estudió Filosofía en Turín y se doctoró en 1954 con una tesis sobre la estética de Santo Tomás de Aquino, quien, según publicó entonces en una nota irónica, tuvo mucho que ver con su descreimiento progresivo y su abandono final de la Iglesia católica. Aquella nota rezaba: “Se puede decir que él, Tomás de Aquino, me haya curado milagrosamente de la fe”. Tras doctorarse, Eco se estableció en Milán, participó en un concurso de la RAI —la televisión pública italiana— que venció y que lo convirtió en compañero del periodista Furio Colombo y del filósofo Gianni Vattimo en una aventura siempre enfocada a difundir el mundo de la cultura.
A sus coetáneos les asombraba, como subraya Gianni Rotta, que “un semiólogo, un crítico, todo un filósofo, se ocupase de cómics, o que un profesor predicase que, para entender la cultura de masa, antes hay que amarla, que no se puede escribir un ensayo sobre las máquinas flipper sin haber jugado con ellas”. Durante los años sesenta trabajó como profesor agregado de Estética en las universidades de Turín y Milán y participó en el Grupo 63, publicando ensayos sobre arte contemporáneo, cultura de masas y medios de comunicación. Entre estos ensayos los más conocidos son Apocalípticos e integrados y Obra abierta. El semiólogo también fue catedrático de Filosofía en Bolonia, en la que puso en marcha la Escuela Superior de Estudios Humanísticos, conocida como la Superescuela, porque su objetivo es difundir la cultura entre licenciados con un alto nivel de conocimientos. También fue fundador de la Asociación Nacional de Semiótica, de la que aún era su secretario.
 Crisis del periodismo
La última de las obras de su fecunda carrera, Año cero, una mirada crítica del gran experto de la comunicación sobre la crisis del periodismo. La trama de Año cero está ambientada en 1992, un año clave de la historia italiana por el caso Tangentopolis, y se desarrolla en la redacción de un periódico en ciernes donde confluyen todas las plagas que golpeaban el país: la logia masónica P2, las Brigadas Rojas, el fin de una era y la aparición de otra con Silvio Berlusconi a punto de saltar al escenario. Eco combatió a Berlusconi—su antítesis total— de forma frontal, pero a quien le preguntaba si el protagonista turbio de su novela estaba inspirado en el líder de Forza Italia, le respondía: “Si quiere ver en Vimecarte un Berlusconi, adelante, pero hay muchos Vimecarte en Italia”.
Tras su muerte, tanto políticos como intelectuales han intentado apresar su personalidad. Según el jefe del Gobierno italiano, Matteo Renzi, Umberto Ecco fue “un gran italiano y un gran europeo”. Por su parte, el presidente de Francia, François Hollande, se acercó un poco más al referirse a él como un inmenso humanista, que se interesaba por todo y que estaba “igual de cómodo con la Historia medieval que con los cómics”. Como subrayó Hollande, “nunca se cansó de aprender y de transmitir su inmensa erudición con elocuencia y humor”.
En cierta ocasión, Umberto Eco dijo: “El que no lee, a los 70 años habrá vivido solo una vida. Quien lee habrá vivido 5.000 años. La lectura es una inmortalidad hacia atrás”. El viernes a las 22.30, en Milán, frente al castillo Sforzesco, Italia perdió un pedazo de inmortalidad.

Lettre d’Hermann Hesse à un jeune artiste

5 janvier 1949




Cher J. K.,
Merci pour ton message de Nouvel An. Il est triste et déprimé et je ne comprends cela que trop bien. Cependant, il y a aussi cette phrase où tu te dis hanté par l’idée qu’un sens et une mission ont été assignés à ta personne et à ta vie et tu souffres de n’avoir pas révélé ce sens ni rempli cette tâche. Voilà qui est encourageant malgré tout, car c’est littéralement vrai et je te prie de te rappeler et de méditer de temps en temps les quelques remarques que je vais faire à ce sujet. Ces réflexions ne sont pas de moi, elles sont vieilles comme le monde et appartiennent à ce que les hommes ont exprimé de plus positif sur eux-mêmes et sur leur mission.
Ce que tu fais dans la vie, je veux dire non seulement comme artiste, mais aussi en tant qu’homme, époux et père, ami, voisin, etc., tout cela s’apprécie en fonction du « sens » éternel du monde et d’après les critères de la justice éternelle, non par référence à quelque mesure établie, mais en appliquant à tes actes ta propre mesure, unique et personnelle. Quand Dieu te jugera, il ne te demandera pas : « As-tu été un Hodler, un Picassso, un Pestalozzi, un Gotthelf ? » Il te demandera en revanche : « As-tu été et es-tu réellement le J. K. en vue duquel tu as hérité certaines dispositions ? » Questionné de la sorte, aucun homme n’évoquera jamais sans honte et sans effroi son existence et ses errements ; tout au plus pourra-t-il répondre : « Non, je n’ai pas été cet homme, mais je me suis du moins efforcé de le devenir dans la mesure de mes forces. » Et s’il peut le dire sincèrement, il sera alors justifié et sortira vainqueur de l’épreuve.
Si tu es gêné par des images telles que « Dieu » ou « juge éternel », tu peux tranquillement les laisser de côté, car elles importent peu. La seule chose qui compte, c’est le fait que chacun de nous est le dépositaire d’un héritage et le porteur d’une mission ; chacun de nous a hérité de son père et de sa mère, de ses nombreux ancêtres, de son peuple, de sa langue certaines particularités bonnes ou mauvaises, agréables ou fâcheuses, certains talents et certains défauts, et tout cela mis ensemble fait de nous ce que nous sommes, cette réalité unique dénommée J. K. en ce qui te concerne. Or, cette réalité unique, chacun de nous doit la faire valoir, la vivre jusqu’au bout, la faire parvenir à maturité et finalement la restituer dans un état de perfection plus ou moins avancé. A ce propos, on peut citer des exemples qui laissent une impression ineffaçable et qu’on trouve en abondance dans l’histoire universelle et l’histoire de l’art. Ainsi, comme on le voit dans beaucoup de contes de fées, il y a souvent un personnage qui est l’idiot de la famille, le bon à rien, et il se trouve que c’est à lui qu’incombe le rôle principal et c’est précisément sa fidélité à sa propre nature qui fait paraître médiocres, par comparaison, tous les individus mieux doués que lui et favorisés par le succès.
[…] Bref, lorsque quelqu’un éprouve le besoin de justifier sa vie, ce n’est pas le niveau général de son action, considérée d’un point de vue objectif, qui compte, mais bien le fait que sa nature propre, celle qui lui a été donnée, s’exprime aussi sincèrement que possible dans son existence et dans ses activités.
D’innombrables tentations nous détournent continuellement de cette voie ; la plus forte de toutes est celle qui nous fait croire qu’au fond, on pourrait être quelqu’un de tout à fait différent de celui que l’on est en réalité et l’on se met à imiter des modèles et à poursuivre des idéaux qu’on ne peut et ne doit pas égaler ni atteindre. C’est pourquoi la tentation est particulièrement forte pour les personnes supérieurement douées, chez qui elle présente plus de dangers qu’un simple égoïsme avec ses risques vulgaires parce qu’elle a pour elle les apparences de la noblesse d’âme et de la morale.
A un certain moment de sa vie, tout jeune garçon a rêvé de conduire une voiture à cheval ou une locomotive, d’être chasseur ou général et, plus tard, de devenir un Goethe ou un don Juan ; c’est une tendance naturelle, inhérente au développement normal de l’individu et un moyen de faire sa propre éducation : l’imagination, pour ainsi dire en tâtonnant, prend contact avec les possibilités du futur. Mais la vie ne satisfait pas ces désirs et les idéaux de l’enfance et de la jeunesse meurent d’eux-mêmes. Néanmoins, on continue à souhaiter faire des choses pour lesquelles on n’est pas fait et l’on se tracasse pour imposer à sa propre nature des exigences qui la violentent. C’est ainsi que nous agissons tous. Mais en même temps, dans nos moments de lucidité intérieure, nous sentons toujours davantage qu’il n’existe pas de chemin qui nous conduirait hors de nous-mêmes vers quelque chose d’autre, et qu’il nous faut traverser la vie avec les aptitudes et les insuffisances qui nous sont propres et strictement personnelles et il nous arrive alors parfois de faire quelque progrès, de réussir quelque chose dont nous étions jusque-là incapables et, pour un instant, sans hésiter, nous nous approuvons nous-mêmes et nous sommes contents de nous. Bien sûr, ce contentement n’a rien de durable ; cependant, après cela, la part la plus intime de notre moi ne tend à rien d’autre qu’à se sentir croître et mûrir naturellement. C’est à cette seule condition que l’on peut être en harmonie avec le monde et s’il nous est rarement accordé, à nous autres, de connaître cet état, l’expérience qu’on en peut faire sera d’autant plus profonde.
En rappelant la mission confiée à tout individu et qui diffère pour chacun d’eux, je ne dois pas oublier que je ne songe pas du tout à ce que les dilettantes de l’art, jeunes ou vieux, appellent la défense et l’affirmation de leur individualité et de leur originalité. Il va de soi qu’un artiste, lorsqu’il fait de l’art sa profession et sa raison d’être, doit commencer par apprendre tout ce qui peut être appris dans le métier ; il ne doit pas croire qu’il devrait esquiver cet apprentissage à seule fin de ménager son originalité et sa précieuse personnalité. L’artiste qui, dans l’exercice de son art, se dérobe à la nécessité d’apprendre et de peiner durement aura la même attitude dans la vie […]. L’effort personnel pour assimiler ce qui peut être appris est un devoir aussi élémentaire dans le domaine de l’art que dans celui de la vie courante […]. L’étude de tout ce qui est susceptible d’être enseigné ne fait pas obstacle au développement de l’individualité, elle le favorise et l’enrichit, au contraire. J’éprouve quelque honte à écrire noir sur blanc de pareilles évidences mais nous en sommes arrivés à ce point où personne ne semble plus avoir l’instinct d’agir selon des règles naturelles et remplace cet instinct par une culture primitive de l’extraordinaire et du saugrenu. En art, je suis nullement ennemi de la nouveauté, au contraire et tu le sais bien, mais dans le domaine moral, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit du comportement de l’homme à l’égard de la tâche qui lui incombe, les modes et les innovations me sont suspectes et je suis plein de méfiance lorsque j’entends les gens raisonnables parler de nouvelles morales, de nouvelles éthiques, comme on parle de modes ou de styles dans l’art.
On exige encore autre chose de l’homme, dans le monde actuel, et cette exigence est propagée par les partis politiques, les patries ou les professeurs de morale universelle. On exige de l’homme qu’il renonce une fois pour toutes à lui-même et à l’idée qu’à travers lui, quelque chose de personnel et d’unique pourrait être signifié ; on lui fait sentir qu’il doit s’adapter à un type d’humanité normale ou idéale qui sera celle de l’avenir, qu’il doit se transformer en un rouage de la machine, en un moellon de l’édifice parmi des millions d’autres moellons exactement pareils. Je ne voudrais pas me prononcer sur la valeur morale de cette exigence : elle a son côté héroïque et grandiose. Mais je ne crois pas en elle. La mise au pas des individus, même avec les meilleures intentions du monde, va à l’encontre de la nature et ne conduit pas à la paix et à la sérénité, mais au fanatisme et à la guerre. Au fond, il s’agit d’une exigence monastique et elle n’est légitime que lorsqu’on a affaire à des moines, à des hommes qui sont entrés librement dans les ordres. Cependant je ne crois pas que cette exigence, liée à une mode, pourrait constituer un danger sérieux pour toi.
Je m’aperçois que ma lettre est presque devenue une dissertation. J’en ferai donc tirer des copies et, à l’occasion, je la ferai lire aussi à d’autres personnes. Je pense que tu n’y verras pas d’objection