jueves, 25 de febrero de 2016

Lettre de Mark Rothko à Clay Spohn

11 mai 1948




Rothko
1288 – 6ème Ave.
N. Y.
Cher Clay,
Clyff vient juste de m’apprendre pour ta maladie — heureusement déjà passée, ou presque passée ai-je cru comprendre — Mell et moi nous hâtons de te souhaiter un bon rétablissement, et te redisons que nous pensons à toi et parlons de toi et de l’été très souvent.
Peut-être n’avons-nous pas même répondu à cette longue lettre que tu nous as envoyée cet hiver, mais si j’étais capable de transmettre un peu de moi-même comme tu le fais dans tes lettres, j’écrirais avec plus de plaisir et plus souvent. Les choses sont telles que je dois presque m’arracher à moi-même une page d’unité.
Je commence à haïr la vie de peintre. On commence par s’entraîner avec ce qui est à l’intérieur de soi en gardant encore un pied dans le monde normal. Puis tu es pris d’une frénésie qui t’emporte au sommet de la folie, aussi loin que tu peux aller sans jamais revenir. Le retour est une suite de semaines hébétées pendant lesquelles tu n’es qu’à moitié vivant. C’est l’Histoire [sic] de mon année depuis que je t’ai vu. Je commence à sentir qu’il faut bien rompre ce cycle quelque part. Pour le reste, tu dépenses ton énergie à résister à la succion des mentalités de boutiquiers pour lesquelles, de toute évidence, on traverse cet enfer.
J’aimerais que nous puissions revivre, sous un autre jour, notre dernier été, car aussi souvent que j’y pense, je me le rappelle comme d’un moment capital. Peut-être peux-tu planifier une visite à N.Y. dans un futur proche. Écris-nous encore, s’il te plaît. Et embrasse pour nous Doug, Jerry, et tous nos amis de l’été dernier.
Mark







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